lundi 23 mars 2009

Sous les ultimes trompettes


Il aurait aimé pouvoir dire "These boots are made for walking" mais il était d'expression française.

Il s'y suffisait aisément dans ses sexualités non pas que dépravées - il aurait aimé être plus sale qu'il ne l'était - mais au sens glissant pour son esprit à réflexion ambiante et pesante. C'est pourquoi il aimait tant les dialogues aux réponses détachées des questions, il se sentait ainsi définit au sein de l'agencement des mots échangés.

Se définir était sa priorité absolu, pas en mot mais en sens, son existence même lui prouvait qu'il eu un sens - pensait il alors naïvement comme un religieux croit en sa croix de bois - il suffisait, lourde tâche, de le trouver. Son plus grand allié fût la musique. Elle est l'espace le plus abstrait qui soit, ainsi aussi le plus parlant.

La musique avait pour lui une franchise bien plus humaine que celle des livres, il avait tant peur du temps qu'il craignait de parcourir 300 pages pour conquérir une pensée, une émotion, celle même que la musique exprimerait en un accord soudain de notes inéditement harmonieux.
Ce franc-parler musical il le retrouva en la poésie. Brève et pourtant sous-jacente, délicate et insultante. Lui.

Mais il savait, même perdu au plus profond d'un livre, même au sein abyssale d'une musique paralysante de frisson, même en ses moments de réflexion dit de gouffre blanc, il savait que tout en lui était à vocation des femmes.

Sa seule certitude à ce propos tumultueux était son engouement corps et âme à toute femme qui à son gout était assez belle et raffinée pour y centrer son attention. Le mystère provenait de ceci qu'il se demandait en ses nuits claires du dessus de son lit sec et poreux : préférait il les aimer ou bien les baiser en une pénombre hasardeuse ? Le respect de l'autre ne se posait pas alors -le respect ne s'immisce que par contexte - la question ne prenait en considération que son être.

Il aimait dire aux inconnus de passages - il ne parlait sincèrement de lui qu'à ces gens là - qu'il fumait en causalité directe à cette interrogation. Fumer seul c'est se laisser l'espace de l'interrogation interne disait-il. Il lui arrivait ainsi, quand une question taraudait son esprit facilement brumeux, de fumer clopes sur clopes jusqu'à satisfaction personnelle.

Son amour du non-sens le perdait encore plus dans sa recherche de soi. Pourquoi, se demandait-il possiblement à juste titre, aimait-il baiser une inconnue alors qu'il était fou amoureux d'une femme ? La psychanalyse - effet de mode qui le déroutait au dégout - lui trouverait à coup sur des réponses issues d'un passé qu'il jaugeait inutile. Il se plaisait à parler de la psychanalyse comme "ce qui prétend que tout à une source". Mais ce type de réponses œdipiennes le mettait dans un état d'indifférence digne d'un verre d'eau.

Son mépris théorique et constant ne se manifestait pourtant que rarement, "putain d'éducation" grognait-il alors après avoir, comme toujours, sortit une formule de politesse aux commerçants minables dont il aimait imaginer la vie horlogée. Mais rarement il s'avouait sa proximité avec eux.

Il s'était mis à écrire pour une raison qu'il ne devinait qu'allongée sur les herbes jamais aussi verte qu'espérées. Il écrivait pour expier tout ce qu'il ne pouvait cracher dans la réalité de fait. Tout autant aimer, qu'insulter. A outrance pour l'équilibre.

Il lui aurait suffit d'un peu d'épique pour combler son soi que seul lui cernait. Pour cela il grattait, il grattait et parfois il jubilait d'œuvres d'autres, parfois de ses propres mots.

C'est pour tout ce cela qu'est son être qu'il se trouva à 02h22, seul dans son appartement restreint, à danser entouré de sa propre fumée - puisque jamais il ne dansait sans fumer - sur le son hybride si ce n'est liquide de Goldfrapp.

Il reste bon à savoir, en finalité de préférence, que cet homme quand il écrivait à son propos, ne le faisait qu'au passé, et à la troisième personne.

Joseph.K


1 commentaire:

  1. ce texte a la beauté d'un labyrinthe... on s'enfonce dans les troubles profonds d'une âme humaine qui vibre un peu plus que les autres... Il faut du courage pour se mettre ainsi à nu...
    H.

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